« Et ne serait-il pas pensable, poursuivit Austerlitz, que nous ayons aussi des rendez-vous dans le passé, dans ce qui a été et qui est déjà en grande part effacé, et que nous allions retrouver des lieux et des personnes qui, au-delà du temps d’une certaine manière, gardent un lien avec nous ? »
W.G. Sebald, Austerlitz (trad. Patrick Charbonneau)
Que perçoit-on, dans un lieu, de son histoire ? Se promener, c’est être attentif à ce que les lieux nous disent d’eux et de nous. Au silence qu’ils gardent aussi parfois. Dans des espaces aussi divers que des parcs paysagers, des emplacements d’anciennes expositions universelles ou coloniales, des sites préhistoriques ou gallo-romains, des châteaux et autres bâtiments en ruine ou encore des friches industrielles, Botanique des ruines se propose d’interroger notre perception proprement physique de l’histoire – et éventuellement ses angles morts.
On accomplira au cours de cet atelier un travail comparable à celui des botanistes : dans un premier temps, au cours d’une marche d’une heure, les participant.e.s effectueront une récolte de sensations et d’impressions dans le lieu ; dans un deuxième temps consacré à l’écriture, on observera de plus près les impressions récoltées et on les reliera à une connaissance plus vaste sur le lieu, au moyen d’une sélection d’archives. Chacun.e sera invité.e à écrire un texte personnel à partir de ces divers matériaux.
On tentera ainsi, ensemble, de « brosser à contre-sens le poil trop luisant de l’histoire », comme nous y invite Walter Benjamin dans Sur le concept d’histoire – mais aussi d’accomplir le geste iconoclaste que le philosophe Paul B. Preciado appelle de ses vœux : « faisons descendre les statues de leurs piédestaux et gravissons-les pour parler et raconter notre propre histoire de survie et de libération » (« Pour un monument à la nécropolitique », Libération, 4 & 5 juillet 2020).
Une Botanique des ruines a été proposée dans le cadre du festival « Indispensable ! », organisé par l’Atelier de Paris / CDCN en septembre 2020, dans le jardin d’agronomie tropicale du Bois de Vincennes.
Photo de couverture : sculpture couchée, jardin d’agronomie tropicale du Bois de Vincennes © Pépita Wald